Votre Excellence, Madame la Gouverneure
générale du Canada,
Monsieur le Président de la Conférence d'étude
canadienne du gouverneur général,
Distingués participantes et participants,
L'Université Laval est très honorée d'accueillir en ses murs la séance de clôture de la Conférence d'étude canadienne du gouverneur général. Nous poursuivons ainsi une tradition qui s'est instaurée en 1983, dont nous sommes très fiers et que nous souhaitons voir se perpétuer. Cette année, nous sommes d'autant plus heureux de vous recevoir que le thème de la Conférence rejoint tout à fait la mission de l'université : former les dirigeants de la prochaine génération.
J'adresse la plus chaleureuse des bienvenues à vous tous qui participez à cette activité prestigieuse. J'ose avouer que je vous envie un peu. Ayant occupé moi-même des fonctions de dirigeant à quelques reprises au cours de ma carrière, j'aurais bien aimé profiter de la chance qui vous a été offerte. Vous avez vécu, j'imagine, une expérience unique qui marquera toute votre vie professionnelle. Vous avez acquis une ouverture qui vous sera des plus utile dans vos interventions futures. Vous avez été sensibilisés à l'extraordinaire diversité de notre pays et de notre société et à l'envergure des transformations qui touchent toutes les sphères d'activité.
Préparer les dirigeants de demain se complique justement en raison du contexte de changement rapide et constant que vivent nos sociétés. Ces mutations, vous les connaissez aussi bien que moi, ont pour nom mondialisation et intégration de l'économie, accroissement de la concurrence tant pour nos entreprises que pour nos établissements de haut savoir, place prépondérante des nouvelles technologies de l'information et de la communication, défi de la protection de la diversité culturelle. Elles ont aussi, trop souvent, pour visage celui de l'inéquité sociale, du décrochage des individus ou des États laissés pour compte dans une compétition insuffisamment maîtrisée.
Devant ces nouveaux phénomènes, les dirigeants et les grands acteurs sociaux des prochaines décennies auront de grands défis à relever et ils devront acquérir des compétences qui les rendent aptes à relever ces défis.
Le premier de ces défis, me semble-t-il, est de composer avec un environnement caractérisé par le changement accéléré. Cette accélération du changement, qu'il soit scientifique, technologique, ou économique, nous force de plus en plus à travailler dans un contexte d'incertitude dans lequel faire des prévisions fiables relève de la gageure. Le meilleur outil du futur dirigeant serait en fait une boule de cristal! Comme elle n'existe pas, l'imagination, la sensibilité aux évolutions floues, l'intuition sont des qualités essentielles.
Comme le disait si bien Deming : " Change is mandatory, survival is optional; choose wisely! " Dans ce contexte, le leader de demain devra non seulement faire face au changement, mais aussi "animer" ce changement, le faire advenir, motiver son entourage et son personnel en ce sens. Au-delà des qualités traditionnelles qu'on reconnaît au gestionnaire, il ou elle devra posséder cette dimension d'agent de changement, de "mobilisateur".
Deuxième grand défi : les leaders de demain devront développer une qualité qui sera de plus en plus précieuse pour les entreprises et organismes : la créativité. C'est un fait bien établi par l'histoire des sciences et des sociétés : les vrais progrès ont toujours été le résultat d'actions hors du cadre établi, souvent de révolutions, tranquilles ou non, quelquefois d'accidents purs et simples. Être leader du changement, c'est de plus en plus savoir mettre en valeur les idées non conformistes, canaliser les esprits révolutionnaires, exploiter les situations imprévues et les accidents. Bref, il vous faudra être à l'aise dans le chaos et l'imprévisible et fuir le confort des structures trop bien établies.
Troisièmement, le champ d'action des individus, des entreprises et, en fait, de toutes les organisations, s'est élargi, gracieuseté de l'Internet et de la globalisation des économies. Il s'étend désormais au monde entier. Les gestionnaires d'aujourd'hui et de demain devront donc déployer une nouvelle panoplie de valeurs et de compétences. Il leur faudra développer l'ouverture d'esprit, parler plusieurs langues et acquérir des connaissances sur les réalités économiques, sociales et culturelles autres que celles de leur milieu d'origine. Dans ce sens, l'expérience que vous venez de vivre dans le cadre de cette Conférence d'étude canadienne du gouverneur général est extraordinaire, puisqu'elle vous a plongés en peu de temps au cur de la diversité géographique et culturelle extraordinaire de notre pays.
Cette nouvelle donne oblige les universités à adapter leur projet éducatif pour offrir aux étudiantes et étudiants une formation plus flexible, plus polyvalente, une formation permettant d'élargir les horizons et de prendre connaissance d'autres cultures, d'autres murs. Ces exigences nouvelles nous préoccupent tout particulièrement à l'Université Laval où nous sommes en train de reconfigurer nos programmes de premier cycle, en particulier pour y inclure un " profil international ", cheminement qui permettra à une proportion croissante de nos étudiants de faire un stage d'étude prolongé dans une université partenaire à l'étranger. La dynamique du changement impose par ailleurs aux universités de mettre en place des programmes de formation continue afin de répondre aux besoins de perfectionnement des diplômés dans ce monde en état permanent d'instabilité et de changement. Les entreprises et organismes ont aussi un rôle à jouer dans la mise à jour des connaissances et des aptitudes de leur personnel. En ce sens, la Conférence d'étude canadienne apporte une contribution inestimable pour affermir les compétences des gestionnaires canadiens.
Mais si je regarde comment se dessine aujourd'hui notre avenir, je suis convaincu que les jeunes actuellement aux études, ceux qui occuperont bientôt nos places, ceux qui dirigeront demain notre société, sont talentueux. Ils sont enthousiastes et n'ont pas peur de s'engager à améliorer le bien-être de leurs concitoyens. Beaucoup possèdent une ouverture sur le monde dont nos sociétés ont justement besoin. Je le déclare en toute franchise : je crois qu'ils seront meilleurs que nous.
Je le vois bien chez nos étudiantes et nos étudiants qui participent activement à l'établissement des orientations de l'Université et à la prise de décisions au sein des organes départementaux, facultaires et universitaires. L'Université Laval est d'ailleurs un modèle dans les relations établies entre la direction de l'Université et les associations étudiantes.
Je le vois aussi dans l'enthousiasme avec lequel nos étudiants réagissent devant notre projet de profils internationaux ou encore dans le succès des missions commerciales étudiantes organisées à l'origine par notre Faculté des sciences de l'administration et qui s'étendent maintenant à d'autres facultés.
Je le vois enfin et surtout dans les projets extraordinaires dans lesquels nos étudiants s'engagent, sur le campus et dans la société. À ce sujet, je voudrais signaler le succès que remporte Forces Avenir, organisme québécois qui a mis sur pied un concours pour reconnaître l'audace et l'initiative des étudiants des universités qui conçoivent et réalisent des projets originaux et qui s'engagent activement dans leur communauté, tout comme dans plusieurs pays en voie de développement. Je me plais à souligner les succès des étudiants de Laval dans cette nouvelle compétition.
Pour conclure sur ce vaste sujet de la formation des dirigeants de demain, je m'en voudrais de passer sous silence la qualité de la formation que dispense notre Université et, en particulier, notre Faculté des sciences de l'administration. Pionnière en matière d'internationalisation et d'utilisation des nouvelles technologies dans la pédagogie, cette faculté garde des liens étroits avec le milieu des affaires et adapte ses programmes aux besoins des entreprises et organismes de tout l'est du Québec. Très engagée en formation continue, ses professeurs conçoivent des programmes taillés sur mesure pour les groupes de gestionnaires dans des secteurs aussi divers que le réseau de la santé, le mouvement coopératif ou, tout récemment, la fonction publique. Elle est aussi très engagée en recherche dans de multiples secteurs, de la finance internationale au développement de l'organisation réseau, en passant par les stratégies de développement de la PME technologique et même l'administration des communautés autochtones. C'est d'ailleurs ici que se tenait, il y a quelques semaines, un colloque sur le Nunavut. C'est notre façon, au-delà de la formation initiale que nous offrons dans tous les domaines du savoir, d'aider des collectivités à accroître les compétences de leurs dirigeants.
Vous voyez donc que nos préoccupations sont en parfaite concordance cette année : préparer des leaders plus efficaces qui sauront accroître le bien-être économique et social de nos communautés et contribuer au progrès de toute la société.
Je remercie Son Excellence, Madame Clarkson, et les organisateurs de cette première Conférence d'étude canadienne du gouverneur général du troisième millénaire, d'avoir encore une fois choisi la première université francophone d'Amérique pour tenir la séance de clôture de cet événement prestigieux. Je vous souhaite une plénière fructueuse et un agréable séjour à l'Université Laval et dans la belle ville de Québec.