entete Université Laval

DISCOURS DE MONSIEUR CLAUDE GODBOUT, RECTEUR PAR INTÉRIM DE L'UNIVERSITÉ LAVAL, À L'INAUGURATION D'UN BUSTE EN HOMMAGE À GEORGES-HENRI LÉVESQUE, LE MERCREDI 14 AOÛT 2002, DEVANT LA BIBLIOTHÈQUE DE L'UNIVERSITÉ LAVAL

Monsieur le Premier Ministre du Québec,
Monsieur l'ancien Premier Ministre du Québec,
Monsieur le Président du Conseil privé et ministre des Affaires intergouvernementales canadiennes,
Monsieur le Ministre délégué à l'Environnement et à l'Eau du Québec,
Monsieur le Directeur général et Représentant du maire de la Ville de Québec,
Monsieur le Président du Comité Georges-Henri Lévesque,
Monsieur le Président de la Fondation du Patrimoine laurentien,
Monsieur le Président des Grandes Fêtes de l'Université Laval,
Madame l'ex-doyenne et Messieurs les ex-doyens de la Faculté des sciences sociales,
Distingués invités,

C'est pour moi un grand plaisir et un privilège de vous accueillir tous ici pour honorer la mémoire du père Georges-Henri Lévesque, l'une des personnalités les plus remarquables de l'histoire de notre université.

Je dis "privilège" parce qu'autour de moi se trouvent des personnes qui ont côtoyé cet homme de sagesse ou qui ont été marqués par son influence. Certains d'entre vous ont eu la chance de profiter de son enseignement, d'autres l'ont choisi comme maître à penser; pour d'autres encore, il a été un collègue, un ami, un modèle.

Je laisserai à ceux qui prendront la parole après moi le plaisir de parler des activités sociales, culturelles et internationales de Georges-Henri Lévesque et de son influence sur la société québécoise. Pour ma part, je retracerai très brièvement, trop brièvement sans doute, les grandes lignes de la carrière universitaire de cet homme au cheminement exceptionnel.

En 1932, l'Université Laval crée une École des sciences sociales qui dispense surtout des cours du soir. Vers le milieu des années 30 arrive à l'Université Laval un jeune dominicain, le père Georges-Henri Lévesque, chargé d'un cours de philosophie économique à l'École supérieure de philosophie.

Dans ses Souvenances, le père Lévesque raconte comment lui est venue l'idée d'organiser ici un véritable enseignement scientifique des sciences sociales. Avec le soutien de quelques prêtres du Séminaire, il présente un projet au chancelier de l'Université, le cardinal-archevêque de Québec, Mgr Villeneuve, qui annonce solennellement la fondation d'une École des sciences sociales, économiques et politiques, le 28 février 1938. Le père Lévesque y sera professeur jusqu'en 1962.

L'École, d'abord rattachée à la Faculté de philosophie créée l'année précédente, ouvre ses portes à l'automne de 1938. Dans l'ouvrage intitulé Cinquante ans de sciences sociales à l'Université Laval, Jean-Charles Falardeau raconte que le cours inaugural du père Lévesque fut d'une éloquence électrisante. "En ce moment, avait-il dit, nous faisons l'histoire de l'Université Laval."

Par ses paroles, le père Lévesque laissait entendre qu'il voyait grand. Son affirmation visionnaire devait se concrétiser cinq ans plus tard par la fondation de la Faculté des sciences sociales, la première au Québec, et la nomination du premier doyen, Georges-Henri Lévesque lui-même. Trois départements et une école sont alors mis sur pied : le Département de sociologie et de morale sociale, le Département d'économique, le Département de relations industrielles et l'École de service social.

Le père Lévesque restera doyen jusqu'en 1955. Plusieurs anciens étudiants et professeurs ont parlé de l'atmosphère de grande liberté et de recherche de la vérité qui régnait dans cette faculté. Avec son charisme légendaire, le père Lévesque faisait participer étudiants et professeurs à son ambition de changer la société. Il les entraînait dans une foule d'activités stimulantes. C'est dans ce climat qu'est né, par exemple, le cercle Léon-Gérin, du nom du premier sociologue québécois, où étaient invités les leaders sociaux de l'époque. Les témoignages réunis dans l'ouvrage collectif que nous lancerons tout à l'heure décrivent bien l'influence de ce maître, de ce grand éducateur.

Au cours des années 40 et 50, la Faculté prend corps grâce à l'enthousiasme et à l'audace de son doyen qui n'hésite pas à envoyer les étudiants les plus brillants poursuivre leurs études aux États-Unis et en Europe. Leur retour à l'Université comme professeurs enrichit la Faculté, mais les idées avant-gardistes qui y sont véhiculées soulèvent quelques tempêtes.

Dans son Récit d'une émigration, Fernand Dumont fait remarquer, très justement, que ce dont nous sommes redevables au père Lévesque avant tout, et je cite : "c'est d'avoir imposé une pareille institution universitaire dans un milieu qui, à tant d'égards, n'en voyait pas la pertinence."

Le père Lévesque fut le professeur de nombreux hommes et femmes qui ont profondément marqué la seconde moitié du XXe siècle au Québec. C'est de la Faculté des sciences sociales que sont issus ceux qui allaient devenir les chefs de file de la Révolution tranquille. Guy Rocher, Jean-Charles Falardeau, Arthur Tremblay, Gérard Bergeron, Léon Dion, Fernand Dumont, Vincent Lemieux - pour ne nommer que ceux-là - y ont tous étudié ou enseigné.

Le père Lévesque nous a quittés en 2000, mais son esprit d'ouverture, la hardiesse de ses opinions, sa générosité restent imprégnés dans la tradition d'excellence que poursuit notre Faculté des sciences sociales avec ses écoles, ses départements et ses centres de recherche. C'est ici qu'ont été formés et que continuent d'être formés les acteurs sociaux dont le Québec, le Canada et d'autres pays ont besoin.

Une contribution intellectuelle d'une telle envergure devait être inscrite dans notre mémoire collective. Je suis heureux que le dévoilement de ce buste se déroule dans le cadre des Grandes Fêtes du 150e anniversaire de l'Université Laval. Même si l'une des devises du père Lévesque était "Notre maître, l'avenir", il est bon de jeter un regard sur le passé pour constater le riche et noble héritage que nous a légué le fondateur et premier doyen de la Faculté des sciences sociales. La devise du Québec n'est-elle pas "Je me souviens"? Je souhaite que ce monument reflète pour nous et les générations futures toute l'admiration et la reconnaissance que nous éprouvons envers lui.

Je tiens à féliciter tous ceux qui ont participé à la réalisation de ce monument et ceux qui font en sorte que se perpétuent l'œuvre et la mémoire du père Georges-Henri Lévesque.

Je vous remercie.

 
visitez
ulaval.ca
© 2009 Université Laval, tous droits réservés