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ALLOCUTION PRONONCÉE PAR MONSIEUR MICHEL PIGEON, RECTEUR DE L'UNIVERSITÉ LAVAL, À LA REMISE D'UN DOCTORAT HONORIFIQUE À PHILIPPE PIÉTACHO, LE MARDI 27 MAI 2003, À 17 H 30, AU THÉÂTRE DE LA CITÉ UNIVERSITAIRE

Mesdames et Messieurs les Consuls,
Monsieur le Chef des Premières Nations,
Monsieur le Récipiendaire d'un doctorat d'honneur,
Mesdames et Messieurs les Membres de la famille de M. Piétacho,
Distingués invités,

Nous sommes réunis aujourd'hui pour la remise d'un doctorat d'honneur à M. Philippe Piétacho, sage et ancien chef innu d'Ekuanitshit. Nous devions, au cours de cette cérémonie, remettre également un doctorat d'honneur à Mme Hélène Carrère d'Encausse, secrétaire perpétuel de l'Académie française, mais la maladie l'a malheureusement empêchée d'entreprendre ce voyage.

Mais avant de parler de l'homme remarquable que nous honorons aujourd'hui, permettez-moi de vous expliquer brièvement le contexte particulier de cette cérémonie.

L'Université Laval décerne généralement des doctorats d'honneur au moment des collations de grades, au printemps, plus précisément au mois de juin. Or, en 2002-2003, elle a dérogé à ses habitudes, car elle a commémoré deux étapes marquantes de son existence : le 150e anniversaire de l'octroi de sa charte par la reine Victoria en 1852 et le 340e anniversaire de la fondation de l'institution qui lui a donné naissance, le Séminaire de Québec, en 1663.

Dans le cadre de ces Grandes Fêtes, toute une série d'activités ont été organisées pour souligner le riche héritage de notre université, faire connaître les différents volets de sa mission et ses projets de développement. Organisé par l'Année francophone internationale, le colloque "Quatre siècles de francophonie et d'échanges Europe-Afrique-Amérique" est en fait la dernière activité scientifique inscrite dans la programmation des Grandes Fêtes; il commémore le 400e anniversaire du premier voyage de Samuel de Champlain au Canada en mai 1603. D'ailleurs, samedi dernier, nous avons dévoilé, à Baie Sainte-Catherine, une sculpture rappelant l'alliance scellée entre Champlain et le chef Anadabijou. Dans ce contexte, nous avons décidé de décerner un doctorat honoris causa à une personne qui a contribué lui aussi au rapprochement des cultures, à une personne dont l'influence sur la vie culturelle et économique de toute une communauté a été et est toujours prépondérante.

Je veux donc dire ma fierté d'accueillir, parmi la grande famille des diplômés de l'Université Laval, M. Philippe Piétacho, qui, tout au long de sa vie, a gardé au centre de ses préoccupations le rayonnement de la langue et de la culture innues et la préservation des richesses du milieu naturel.

Je suis d'autant plus fier que les chercheurs de l'Université Laval ont depuis longtemps entretenu des relations étroites avec les Innus québécois, et M. Piétacho s'est toujours montré favorable aux travaux de recherche que des professeurs et leurs étudiants ont réalisé auprès des siens. En lui décernant un doctorat d'honneur aujourd'hui, l'Université Laval veut entre autres souligner sa contribution au développement de la recherche. En contrepartie, des membres de sa communauté ont pu acquérir, à l'Université Laval, une formation de base en recherche sociale et culturelle. Je voudrais notamment souligner ici qu'une collaboration s'est établie entre l'Institut culturel et éducatif montagnais et notre Direction générale de la formation continue pour élaborer un programme de certificat en insertion sociale et professionnelle à l'intention d'intervenants amérindiens. Le 31 mai prochain, nous remettrons les diplômes à une première cohorte entièrement autochtone.

Mais revenons à Philippe Piétacho. Il ne le dira pas lui-même, mais moi, je peux le dire : l'une des caractéristiques de son parcours est sans aucun doute la sagesse.

De quoi est faite cette sagesse? Dans un très beau texte appartenant à la culture amérindienne, qui est en fait une prière au Grand Esprit intitulée "Permets que je chemine dans la beauté", on trouve cette phrase : "Donne-moi la sagesse, afin que je puisse comprendre les choses que tu as enseignées à mon peuple." Je crois que c'est justement dans cette compréhension profonde des traditions et des valeurs du peuple innu et dans la volonté de défendre et de transmettre ces trésors millénaires que réside la sagesse de M. Piétacho.

Ces quelques mots ne font hélas! qu'effleurer les qualités et les réalisations de Philippe Piétacho, et je laisserai à M. Paul Charest, professeur au Département d'anthropologie de la Faculté des sciences sociales de l'Université Laval, le soin de retracer l'itinéraire impressionnant de M. Piétacho dans quelques instants.

Philippe Piétacho, vous qui réunissez si bien les qualités que nous nous efforçons d'inculquer à nos étudiants, je crois sincèrement que notre université s'enrichit en vous accueillant parmi ses docteurs honoris causa.

Nous sommes convaincus que vos principes et vos actions serviront de source d'inspiration et de motivation aux nouvelles générations désireuses de contribuer au progrès culturel, social et scientifique de notre société. Nous souhaitons en effet qu'il y ait parmi nos diplômés des chefs de file qui, comme vous, cherchent à préserver le beau et le bien pour construire la société de demain sur des valeurs solides.

Cher Monsieur Piétacho, je souhaite que cette marque de reconnaissance soit pour vous un encouragement à poursuivre votre travail et vos interventions si nécessaires dans notre monde où la sagesse se fait un peu rare.

Ce fut une joie et un privilège hier soir de faire votre connaissance, et cela a permis à un recteur "blanc" de mieux connaître ses frères des premières nations.

Je vous remercie.

 
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